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Ces géants de la tech qui fondent sur l'Afrique

Le Point
Qu’ils soient américains ou chinois, les géants de la tech multiplient les initiatives et implications sur le Continent. Illustration.
En toute discrétion, Jack Dorsey, le PDG et fondateur de Twitter et de la société de paiement électronique Square, trace son sillon sur le continent. Loin de la frénésie et du tapage des réseaux sociaux, l’Américain vient de soutenir coup sur coup deux start-up africaines. Le 20 février 2020, il a fait, à titre personnel, un don de 6 000 dollars à DevCareer, une entreprise technologique nigériane à but non lucratif, pour former des développeurs sur le continent. Une dizaine de jours plus tôt, le fondateur de Twitter annonçait son soutien à BitSika. Lancée il y a à peine cinq mois par Atsu Davoh, un jeune Ghanéen, cette start-up connaît un démarrage fulgurant avec 1 million de dollars de transactions en cryptomonnaies réalisées début janvier au Ghana et au Nigeria via des SMS. BitSika compte développer ses services dans plusieurs pays, notamment francophones, l’île Maurice, le Mali, la Côte d’Ivoire, le Sénégal, le Gabon et le Cameroun.
Twitter et Square, mais aussi Facebook, Google, Microsoft, Uber ou les chinois Ali Baba et le moteur de recherche Baidu font les yeux doux à l’Afrique. De fait, les rois mondiaux des big tech, de la Silicon Valley à Hangzhou, en Chine, fondent sur le continent comme une nuée de sauterelles sur une récolte prometteuse.
Avant de faire ses emplettes sur le continent, Jack Dorsey avait réalisé tout au long du mois de novembre 2019 une tournée africaine, qui lui a permis de rencontrer des entrepreneurs au Nigeria, au Ghana, en Afrique du Sud et en Éthiopie. Il avait conclu son séjour par un post qui a fait le tour de la twittosphère africaine comme une traînée de poudre.
« Triste de quitter le continent… pour l’instant. L’Afrique définira l’avenir (en particulier le bitcoin !). Je ne sais pas encore où, mais je vivrai ici pendant 3 à 6 mois au milieu de 2020 », a-t-il tweeté le 27 novembre dernier depuis l’aéroport international d’Addis-Abeba en Éthiopie. Depuis, plusieurs pays du continent se disputent et multiplient les plaidoyers pour savoir qui accueillera le patron emblématique et visionnaire de la Silicon Valley. « Jack Dorsey est au bon endroit au bon moment et il investit le temps nécessaire pour commencer à comprendre la complexité du marché africain », a commenté Witney Schneidman, membre de l’Africa Growth Initiative et ancien sous-secrétaire d’État adjoint aux affaires africaines sous Clinton.
Naissance d’un tourisme d’affaires high-tech
Ce tourisme d’affaires high-tech s’est véritablement développé à partir de 2015 avec une visite plutôt discrète du directeur général de Microsoft Corporation, Satya Nadella, à Nairobi. Un groupe qui profite par ailleurs du travail de fond en Afrique de la fondation Bill & Melinda Gates. Mais c’est le séjour du fondateur de Facebook Mark Zuckerberg au Nigeria et au Kenya, en 2016, deux pays qui figurent parmi les cinq principaux utilisateurs du réseau social sur le continent, qui a été le premier à être mondialement médiatisé. Sur un continent qui a vu les abonnés à Facebook croître de 732,8 % entre 2010 et 2016, le magnat des médias sociaux a affirmé lors de sa tournée : « C’est en Afrique que l’avenir se construira. »
L’Afrique, un marché qui attire…
C’est une véritable ruée des Big Tech vers l’Afrique, qui abritera la moitié de la population mondiale d’ici 2050. « C’est un marché naturel pour tout entrepreneur dans les technologies », insiste Witney Schneidman. En avril dernier, Google implantait au Ghana son premier laboratoire de recherche sur l’intelligence artificielle du continent. En mai, c’était à Microsoft d’annoncer vouloir investir 100 millions de dollars dans les cinq prochaines années pour créer un centre de développement technologique en Afrique, avec des sites au Kenya et au Nigeria. Google, mais aussi Facebook, Uber, Square, Visa, Mastercard ou Salesforce soutiennent et prennent des participations dans des start-up locales.
… sur fond de confrontation sino-américaine
Mais derrière cette euphorie high-tech se cache aussi une guerre entre Washington et Pékin. Moins médiatisés, les acteurs chinois sont présents. Ainsi, en 2019, Visa a acquis 20 % du Nigerian PalmPay, la plus grande plateforme de services financiers d’Afrique. La start-up a aussi levé 40 millions de dollars auprès… du fabricant chinois de téléphones portables Transsion. Au total, selon des estimations, les investisseurs chinois en capital-risque auraient engagé plus de 220 millions de dollars fin 2019 dans des start-up africaines (PalmPay, la solution de paiement en ligne Opay, etc.).